Une structure agile et polyvalente
Quand on rencontre Anthony Voisin, cofondateur du studio Terminus, on comprend vite qu’on a affaire à quelqu’un qui avance avec lucidité, pragmatisme… et une bonne dose de curiosité.
Installé à Nantes, il pilote avec son associé un jeune studio à la trajectoire déjà dense.
Publicité, clips, long-métrages, VFX ou animation 3D : Terminus touche à tout.
Mais derrière cette diversité, c’est surtout une volonté d’explorer qui guide chaque choix.

« Je supervise la partie 3D et je m’occupe du développement commercial », explique-t-il. « Mon rôle, c’est d’aller chercher les projets… puis de les faire aboutir. »
Une fois les contrats signés, il encadre les équipes, échange avec les clients, producteurs ou réalisateurs selon les cas, et veille à faire coïncider les ambitions artistiques avec les contraintes de production. « On travaille sur tout type de formats, du spot publicitaire à la série, en passant par le clip ou le long-métrage, que ce soit en animation ou en effets spéciaux. »

Aujourd’hui, Terminus, ce sont trois permanents, une dizaine de personnes avec les intermittents, et quelques stagiaires. « On a monté le studio il y a deux ans et demi. Je ne peux pas dire qu’un projet en particulier me rend plus fier qu’un autre. Ce qui me rend fier, c’est d’avoir créé le studio, et de réussir à tenir le cap. Ce qu’on voulait, avec Christophe, mon associé, c’était explorer différents terrains. Et c’est ce qu’on fait. »
La jeune structure a déjà participé à cinq longs-métrages, dont trois sélectionnés à Cannes. Elle a produit des pubs pour le luxe, des cinématiques de jeu vidéo, des courts-métrages… et s’attaque désormais à ses propres contenus. « On développe actuellement une séquence entièrement produite en interne, avec deux personnages dans un décor. On la pense comme une petite cinématique de jeu, mais l’enjeu, c’est la recherche visuelle. C’est une de nos spécialités : créer un look, proposer un rendu original en 3D à partir d’une intention graphique 2D, ou inventer un univers visuel complet. »
Grandir en pleine tempête
Mais derrière cet enthousiasme se cache aussi une part d’incertitude. Car si le lancement de Terminus a coïncidé avec une période d’expansion, la dynamique a rapidement changé. « Quand on a lancé le studio, le secteur était en plein boom », se souvient Anthony. « Post-Covid, les studios se multipliaient, les projets affluaient. On parlait de plein emploi. Le vrai défi, c’était de recruter, pas de trouver du travail. »
Puis la tendance s’est retournée. Moins de financements, moins de productions, une forme d’attentisme s’est installée dans toute la filière. « On est encore une jeune structure, donc on a pu s’adapter. Mais on a vu la différence, très clairement. Et aujourd’hui encore, on sent que le secteur est en pleine reconfiguration. »
Anthony refuse de céder au pessimisme, mais ne minimise pas les difficultés. « Certains jeunes diplômés peinent à faire leur place. C’est un fait. Ce n’est pas ce qu’on leur avait annoncé, mais personne n’avait prévu un retournement aussi rapide. » Selon lui, les transformations en cours sont profondes, mais pas insurmontables. « On voit émerger de nouveaux outils, de nouvelles manières de produire. Le temps réel, par exemple, hérité du jeu vidéo, entre de plus en plus dans les pipelines de fabrication. Il y a aussi l’IA, qui suscite beaucoup de questions. »

Sur ce sujet, le positionnement de Terminus est mesuré : « On utilise l’IA sur des tâches techniques, pour automatiser certains process. Mais pour ce qui est de la création d’images, on reste sur des outils classiques. On observe, on teste, mais on avance avec prudence. »
Quant aux métiers, Anthony voit poindre des évolutions plus que des disparitions. « Des fonctions vont sans doute se transformer. Certaines tâches seront partiellement automatisées. Mais cela peut aussi libérer du temps pour se concentrer sur des aspects plus créatifs ou plus techniques. Et de nouveaux profils vont apparaître : des techniciens capables d’intégrer intelligemment l’IA dans la production, des artistes à l’aise avec ces nouveaux workflows. »
Pour lui, il ne s’agit pas d’un effondrement, mais d’un changement de paradigme. « Nos métiers vont continuer d’exister, surtout là où l’exigence est forte, dans des secteurs comme le luxe ou le cinéma d’auteur. Mais on devra faire évoluer nos compétences. L’erreur serait de rejeter en bloc ces évolutions. Il faut au contraire s’y préparer, et former les jeunes à les appréhender avec recul et discernement. »
Former les profils hybrides de demain
Interrogé sur les profils qu’il recherche, Anthony est clair : la polyvalence est un atout, surtout dans un petit studio. « Les généralistes, ceux qui peuvent modéliser, animer, faire du lighting… ce sont des perles. Mais ce qu’on cherche aussi, ce sont des gens qui comprennent les contraintes professionnelles : savoir livrer en temps, tenir un planning, répondre à une demande client. »
C’est là que les formations peuvent encore progresser. « Les jeunes issus de bonnes écoles sont techniquement solides. Mais ils manquent parfois de recul sur la production : ils veulent que ce soit parfait, alors que parfois, il faut savoir livrer quelque chose de correct, dans les temps. Ils ont du mal à accepter les retours clients, surtout si ça dénature leur travail. On les accompagne, mais ça manque dans les formations. »
À ce titre, les doubles cursus qui allient compétences créatives et gestion de projet lui semblent très pertinents. « Un profil qui comprend les enjeux professionnels, c’est précieux. Il peut devenir lead, encadrer une équipe, faire le lien avec le client. Ce sont ces profils-là qui permettent à un studio de prendre en charge plus de projets. »
Et si on lui demande ce qu’il attend d’un jeune qui débute dans le métier ?
« De la curiosité. C’est ça qui fait la différence. Ceux qui s’en sortent sont ceux qui explorent, qui testent, qui ne se contentent pas des outils vus en formation.
Il faut sortir de sa zone de confort, toucher à tout, s’ouvrir à d’autres disciplines : photo, vidéo, sculpture… Et surtout ne pas se verrouiller sur un seul logiciel. »


Dans cinq ans, Anthony espère voir Terminus structuré autour de deux pôles clairement identifiés :
Terminus Animation, dédié à l’animation 3D, et TERMINUS Film, spécialisé dans les VFX pour la fiction, le clip ou la publicité.
- Développer notre équipe permanente avec les talents qu’on a pu former par le passé entre autres.
- Et pourquoi pas pouvoir produire nos propres contenus (on aimerait pouvoir produire des projets courts à forte valeur créative).