Animation 3D, Nos anciens au générique

Nos anciens au générique : Inès Martin, Lighting Artist chez Illogic Studio, est au générique de la pub Intermarché 2025, un projet auquel ont participé 18 anciens de l’ESMA.

3DVF.com pour l'ESMA

9 minutes de lecture

Serait-ce la magie de Noël à l’œuvre? Lancée il y a à peine quelques jours, la publicité d’Intermarché pour les fêtes de fin d’année n’en finit pas de faire parler d’elle, bien au-delà de nos frontières.

Diffusée le 6 décembre en prime time sur TF1, ce court métrage de deux minutes trente mettant en scène le Mal-Aimé, un loup qui tente de s’intégrer dans la vie de la forêt, et plus précisément au dîner de fin d’année de sa communauté, s’est démarqué par son animation de grande qualité qui a rapidement conquis le coeur de millions de personnes.

Véritable phénomène viral qui a depuis enflammé les réseaux sociaux, ce court métrage publicitaire cumule aujourd’hui plus de 600 millions de vues et a également été salué pour sa simplicité, son message touchant, et son recours à des équipes d’animation de talent.

Parmi les vrais humains derrière cette belle surprise de Noël, on retrouve Inès Martin, diplômée de l’ESMA en 2023 et Lighting & Compositing Artist pour Illogic Studios. Alors qu’elle vit, avec son studio, un véritable rêve éveillé depuis quelques jours, nous avons eu la chance d’échanger avec elle sur cette aventure, et sur son parcours depuis la fin de ses études. 

Portrait de Inès Martin, Lightin & Compositing Artist chez Illogic Studio

Pouvez-vous nous parler de votre parcours depuis la sortie de l’école, jusqu’à ce projet? 

Je dois avouer que ma route a été plutôt ensoleillée. Pour être honnête, je n’avais même pas encore eu le temps de finir mon film de fin d’études qu’Illogic Studios m’avait déjà contacté pour rejoindre leurs équipes en tant que Lighting et Compositing artist. Ayant peur de passer à côté de cette opportunité, j’ai (pendant un court laps de temps) combiné le travail au studio la journée et la production de mon film de fin d’études le soir. Avec du recul il aurait sans doute été plus simple d’en parler plus tôt à mon école ou à mon employeur, mais je voulais que mes camarades puissent toujours compter sur moi sans pour autant passer à côté de cette offre, que je ne regrette absolument pas d’avoir accepté.

Après cinq mois chez Illogic Studios, je suis parti chez Fortiche sur la production de la deuxième saison d’Arcane, puis je suis retourné chez Illogic Studios, et cela fait maintenant un an que je fais partie du décor.

J’ai eu beaucoup de chance, car je suis tombée dans ces deux entreprises prestigieuses en début de carrière et j’ai pu y rencontrer de merveilleuses personnes qui sont maintenant, au-delà d’être de simples collègues, pour la plupart devenues des amis.

Nous réalisons cette interview suite au succès phénoménal de la pub Intermarché sur laquelle vous avez travaillé, quel était votre rôle exact sur ce projet et la période à laquelle vous êtes intervenue?

J’étais Lighting artist sur le projet, mon rôle était donc d’apporter par le travail de lumière, une émotion, une ambiance, une énergie particulière à la scène.

Concrètement, j’étais responsable des séquences à l’intérieur de la cabane, des plans de nourriture et de certains plans du banquet de Noël.

Extrait Publicité Intermarché ©Illogic Studio

Ce qui était attendu, c’était une ambiance qui évoluait au fur et à mesure de l’état d’esprit du loup. Plus celui-ci évoluait, plus la lumière devenait chaleureuse.

Extrait Publicité Intermarché ©Illogic Studio

Nous avons eu sept mois de production sur ce film, ce qui nous a permis de mettre en place une direction artistique lumineuse, discutée et réfléchie.

C’est agréable parfois de prendre le temps de se questionner sur ce genre de question, car cela nous permet de nous exprimer artistiquement tout en proposant un film avec les meilleures images possibles. De mon côté, j’ai eu un impact direct sur les ambiances, les directions de lumière, ainsi que sur la mise en valeur esthétique des plans.

Quelles contraintes techniques ou artistiques ont marqué ce travail?

C’était une nouvelle façon de travailler avec laquelle nous n’étions pas particulièrement tous familier. De plus, nous avons dû effectuer beaucoup de recherches techniques et artistiques sur ce projet qui d’une certaine manière nous sortait de notre zone de confort, avec une toute autre approche à mettre en place.

En ce sens, ce projet nous a tous beaucoup appris, que ce soit en termes d’optimisation des logiciels, en termes de mise en place d’un nouveau style graphique, et aussi en termes d’humain. Nous sommes passés d’une équipe d’environ quinze personnes au studio à environ 70 artistes. Tout était beaucoup plus grand.

Quels outils ou logiciels avez-vous utilisés durant cette production?

On utilisait principalement Houdini/ Solaris avec un pipeline USD, pour tout ce qui concerne l’image. Concernant l’animation et le rigging, nous avons utilisé Maya, et Nuke pour le compositing. D’autres logiciels comme Zbrush, Photoshop ou encore Da Vinci Resolve ont également fait partie de notre boîte à outils sur ce projet. J’en oublie sûrement d’autres mais les principaux sont là.

Comment s’est passée la communication au sein de cette équipe, soudain beaucoup plus importante?

Dans un métier comme le nôtre, la communication inter-équipe, c’est le plus important.

Nous étions en constante communication les uns avec les autres, c’est une habitude qui est tellement présente au sein de nos équipes qu’il nous serait impossible de faire autrement. Je pense que sans cette communication, on aurait eu du mal à passer au-delà de certains défis techniques ou tout simplement d’avoir une cohérence entre artistes sur le projet.

De mon côté, j’étais en constante interaction avec le compositing, qui suit directement le lighting dans la chaîne de production. En fait, le lighting et le compositing travaillent main dans la main pour traduire la vision artistique des équipes, et l’ambiance finale du projet.

Quels acquis de votre formation vous ont servi directement sur ce projet?

Pendant ma formation en animation 3D et VFX à l’ESMA, j’ai énormément travaillé mon œil et ma sensibilité aux détails. Artistiquement, cela m’a aidé à devenir une professionnelle plus minutieuse et de parfaire un peu plus mon savoir-faire. La formation m’a aussi appris la rigueur et le respect des deadlines, et la capacité à tenir des délais (même très courts). Sur ce projet, j’ai beaucoup appris sur Houdini et Solaris. Ayant principalement été formée sur Maya, c’était assez nouveau pour moi, mais je m’en suis plutôt bien sortie ! 

Je pense pouvoir dire que je suis aujourd’hui assez à l’aise avec le lighting dans ce logiciel. J’avais déjà fait quelques productions sur Houdini avant ce projet, mais cette expérience a été déterminante pour moi. 

Comment vous sentez-vous aujourd’hui, alors que ce projet fait le tour du monde?

Je ne réalise toujours pas bien je crois, on ne s’y attendait tellement pas. On a vu l’engouement monter assez vite, et puis du jour au lendemain on avait tous les médias aux portes du studio. Nous avons vu les réactions sur les réseaux qui ne faisaient qu’amplifier, c’est complètement dingue ! Mais nous sommes agréablement surpris et très touchés des retours positifs sur notre travail. Merci à toutes et tous pour cette reconnaissance.

Qu’aimeriez-vous explorer dans vos prochains projets (artistiquement ou techniquement)?

J’aimerais m’essayer à l’animation en temps réel, ainsi qu’aux VFX. J’ai tellement de choses à découvrir encore. Ma carrière vient à peine de commencer et j’ai soif d’apprendre et d’essayer plein de nouvelles choses. J’aimerais aussi faire du long métrage, une expérience à laquelle je n’ai pas encore eu la chance de participer. Jusqu’ici, j’ai travaillé à la production de publicité, de teasers, de séries, mais jamais de long métrage. Et j’admets avoir très envie de cocher cette case.

Quels films, jeux ou univers vous inspirent aujourd’hui?

J’aime énormément le cinéma de Xavier Dolan, qui m’inspire dans sa photographie et sa capacité unique à capter l’émotion de ses personnages. Par ailleurs, j’ai beaucoup d’affection et d’admiration pour le travail du réalisateur coréen Bong Joon-ho.

Du côté de l’animation, j’ai une affection particulière pour la stop motion, que j’aimerais voir plus souvent à l’écran. J’aime aussi beaucoup les films de Satoshi Kon qui sont de véritables merveilles cinématographiques. Enfin, impossible de ne pas citer les grands studios comme Illumination, Dreamworks ou Disney-Pixar, qui sont pour moi des références au quotidien.

Quel conseil donneriez-vous à un étudiant qui voudrait marcher sur vos traces?

Il m’est arrivé de douter pendant mes études, ou même qu’on puisse me dire que ce n’était peut-être pas la bonne voie pour moi. Ce genre de négativité, il faut pouvoir le transformer en énergie positive et travailler avec passion et amour pour montrer de quoi on est capable. Je ne regrette pas d’avoir persévéré. Après, il n’y a pas de secret : dans les studios, on vous dira souvent que la clef, c’est la qualité de votre travail, et votre sympathie à l’égard des autres.

Et aux écoles, qui forment des étudiants aujourd’hui? 

Peut-être un peu plus oser, et laisser les étudiants exploser de créativité, sans les brider. Parfois, le génie se cache dans les idées auxquelles on aurait pas pensé. Je conseillerais aussi de ne pas se laisser dépasser par les nouvelles tendances de logiciels au sein de l’industrie, qui évoluent très vite, et de se tenir bien à jour sur ce qui est utilisé en production afin d’adapter et de faire évoluer la formation pour le mieux.

Un mot pour terminer?

Je voudrais remercier l’ensemble de l’équipe Illogic Studios pour sa confiance, pour ces moments de travail, de joie et de bonne humeur. Je me lève chaque matin avec l’envie de travailler et j’ai conscience que c’est un luxe. Merci à mes collègues et patrons qui sont, et ils le savent, bien plus que ça à mes yeux maintenant. Et surtout merci au public pour leurs retours positifs, qui donnent beaucoup d’espoir aux artistes et aux industries créatives en ces temps un peu difficiles.

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