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Swing to the Moon : dans les coulisses d’un succès signé ESMA

Avatar de Alexis

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Choisir une araignée comme héroïne d’un film de fin d’études n’allait pas de soi. Et pourtant, c’est le pari qu’a fait l’équipe de swing to the moon, réalisé en 2022 à l’ESMA dans le cadre de la formation en cinéma d’animation 3D et effets spéciaux.

Sur la scène internationale

À l’image de leur personnage, une araignée attendrissante qui rêve de s’envoler vers la lune, l’équipe n’a reculé devant aucun défi pour aboutir à ce résultat impressionnant, qui a su convaincre tant le jury de l’Esma Graduation Show 2022, que les festivals internationaux.

Marie Bordessoule, Chloé Lauzu, Adriana Bouissié, Vincent Levrero, Nadine De Boer, Solenne Moreau et Elisa Drique ont réussi avec ce film un vrai petit tour de force.

Sélectionné dans de nombreux festivals prestigieux, swing to the moon a reçu un accueil triomphal au SIGGRAPH 2023, où il a reçu le trophée du meilleur projet étudiant.

Le film a continué son parcours pour remporter au total 27 prix ! Parmi ceux-ci, le prestigieux Prix GENIE Awards du Meilleur Film Étudiant, au PIDS.

Depuis, il a également battu tous les records de vues sur la chaîne Youtube ESMA Movies, avec plus de 3 millions de vues en 1 an.  

Comment ce film a-t-il vu le jour, et quels ont été les défis de cette production ?
C’est ce que nous vous proposons de découvrir ici. 

Un environnement à l’échelle de ses personnages

Ce qui marque d’emblée dans swing me to the moon, c’est la richesse de la nature dans laquelle évolue Temi, la petite araignée aux rêves de grands espaces. La forêt est verdoyante, peuplée de lucioles, de pissenlits et de fleurs, et on se laisse bercer par cet environnement riche et doux. 

La lumière mise en place par l’équipe du film, qui rappelle l’esthétique des studios Pixar autant que celles de grandes productions 3D européennes, apporte beaucoup de chaleur à cet univers, et crée (avec les textures, elles aussi très finement travaillées) un sentiment de confort, un véritable cocon dans lequel on voudrait se blottir.

Un personnage unique qui a poussé l’équipe à se dépasser

Pour créer Temi, l’équipe (dont une partie des membres sont eux-mêmes arachnophobes) s’est d’abord penchée sur ce qui permettait de reconnaître une araignée, avant de retirer un à un tous les aspects « terrifiants » de ces créatures comme l’abdomen, ou les yeux multiples.

« Au contraire », explique Elisa Drique (co-réalisatrice, surfacing, modeling, lighting & grooming) parlant au nom de son équipe, « nous avons accentué ce qui peut la rendre mignonne comme ses grands yeux expressifs et sa fourrure duveteuse.

Le défi était de garder ce côté « araignée » tout en évitant de créer de l’inconfort chez des membres du groupe. 

Notre référence principale était le court-métrage « Piper » de Pixar, ce petit oiseau qui découvre la plage et ses vagues. Nous étions tous et toutes d’accord que nous voulions reproduire ce côté « mignon » et « découverte du monde », et c’est ce qui nous a guidé pour Temi. »

La maîtrise technique au service d’une création de haut niveau

Pour mener ce projet à bien, l’équipe de swing to the moon a mis en pratique les enseignements de leur formation en animation 3D et effets spéciaux.

En utilisant les compétences développées sur Maya, Houdini et Blender, les membres en charge de l’animation et du rigging ont pu donner vie à Temi et aux autres créatures qu’elle rencontre.

C’est également au travers de ces outils, combinés à la suite Adobe, que l’univers dans lequel évolue la petite araignée a acquis toute sa profondeur.

ZBrush a également été un outil essentiel pour la sculpture 3D des personnages, mais aussi des décors, qu’ils soient naturels ou créés par l’homme.

Une maîtrise à la fois technique et artistique que l’on retrouve autant dans la gestion des poils de l’araignée que dans le design des plantes présentes dans le film, et en particulier dans les trèfles que découvre Temi lorsqu’elle atterrit sur le sol de la forêt.

Des éléments de décor anodins, mais qui marquent l’esprit de par leur finesse et leur réalisme assez impressionnant.

La scène d’envol des lucioles représente très bien la complexité de ce travail, et le niveau de maîtrise atteint par les équipes de swing to the moon

« Pour cette séquence, nous avions un plan qui apparaissait déjà dans le trailer », détaille Elisa Drique, « nous avons donc dû réfléchir aux problématiques des foules assez tôt.

À l’origine, nous pensions utiliser Houdini pour la foule de lucioles mais finalement, Blender était plus facile à paramétrer et plus rapide pour rendre les images.

Swing to the moon Au coeur de la création

Une autre problématique qui s’est imposée était celle de la simulation des poils de Temi, car le fait qu’il avance tiré par la lucioles rendait la simulation compliquée, les poils étaient complètement tirés en arrière. In fine, nous avons simulé les poils de Temi sur place, avec juste un léger vent sur lui, en retirant toute translation dans son mouvement.

Poster

En terme d’étapes, les animatrices commençaient par animer la luciole principale et Temi (principalement des cycles d’animation), ensuite le couple était contraint sur un motion path pour la jolie direction de vol, puis venait la simulation des poils sur Houdini (seules les guides étaient simulés, puis on réinjectait ces guides dans XGen où se trouvait le groom principal), ensuite il fallait faire la foule environnante et enfin le lighting, le rendu (Maya et Renderman) et le compositing (Nuke). »

Petite anecdote, en exclusivité : le bruit des lucioles vient de chaussettes secouées par une membre du groupe devant le micro d’enregistrement. Preuve s’il en est qu’au-delà de l’excellence technique, il faut une bonne dose d’ingéniosité pour aboutir à ce résultat de haut niveau !

Entre exigence et contraintes techniques

Pour Solenne Moreau (co-réalisatrice, animation, storyboard & layout), ce travail de longue haleine pour faire face aux contraintes techniques et pour pousser la qualité artistique au maximum est également une des raisons qui explique le succès du film.

« Malgré le temps écoulé, je porte toujours un regard critique sur le film, à voir les imperfections, ce qui aurait pu être amélioré. Mais à chaque visionnage j’arrive de mieux en mieux à me placer en tant que spectateur et apprécier le travail final. J’ai beaucoup d’affection pour la séquence en apesanteur de la fin. J’adore la musique (composée par Dorian Lehmann), et elle est particulièrement belle dans ces scènes.

Enfin, le fait d’avoir tout donné pour amener notre petite araignée au bout de son rêve, je pense que ça se ressent au travers du film. C’est peut-être ce qui touche les gens. »

Une équipe soudée pour atteindre l’excellence

Compétence indispensable pour pouvoir s’épanouir dans l’industrie du cinéma d’animation 3D, la capacité à travailler en équipe de ces étudiants a été pleinement testée pendant la production de swing to the moon.

Pour Elisa Drique, c’est d’ailleurs l’ingrédient principal qui a permis à ce projet d’aboutir. Un constat que fait également Vincent Levrero (co-réalisateur, lighting, compositing, modeling, FX & surfacing), pour qui l’entente et la cohésion du groupe font probablement partie des ingrédients miracles qui ont permis au film de voir le jour, et de toucher autant de public. « Nous avions une vision commune du projet et ça nous a permis de bien avancer sans rencontrer de problématiques insurmontables.

Je pense que, de par cette formation, l’école prépare bien au monde du travail en ce sens, ainsi qu’au travail de groupe.»

Des retours publics et professionnels unanimes

Encensé par le jury, swing to the moon a également rencontré un public vaste durant son parcours en festival.

Présenté au SIGGRAPH, le film a aussi été montré en France, en Espagne, au Portugal, en Italie et à Tokyo dans des événements de renommée internationale. Avec, dans chaque cas, un accueil chaleureux du public pour cette araignée très appréciée par petits et grands amateurs de cinéma d’animation. 

« Nous avons reçu des retours de personnes de nombreux pays à travers le monde », ajoute l’équipe, « que ce soit par les festivals, par mail ou dans les commentaires YouTube, des parents qui disent que leur enfant demande à revoir le film encore et encore, … Nous avons même reçu des messages d’élèves d’une classe par un mail de leur enseignant, c’était adorable! »

Mais ce qui compte particulièrement pour Adriana Bouissié (co réalisatrice, rigging & animation), c’est que le film ait été fait « pour nous avant tout. Nous voulions être fiers de notre travail, fiers de Temi, et on s’est fait confiance les uns les autres. »

Un ingrédient indispensable de toute collaboration dans l’industrie du cinéma d’animation, que l’équipe de swing to the moon applique désormais chacun à leur niveau dans leurs carrières professionnelles.

Découvrez le film Swing To The Moon, disponible dans son intégralité sur la chaîne YouTube ESMA Movies :

Poster